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Bénédicte à la campagne...
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1 septembre 2014

Je cultive donc je pense..

_MG_6872Me voilà de retour des jardins. Bénédicte n'est plus que jamais à la campagne, rassurez-vous. Je vous avais laissés il y a maintenant près de 6 mois alors que nous venions d'installer le tunnel. 6 mois, 2 saisons complètes de maraichage...et quelles saisons !

Tenir un blog de façon régulière et pratiquer une activité de maraichage relèvent du défi. Combien de fois n'ai-je pas eu envie d'écrire sur un sujet ou l'autre au cours de toutes ces semaines. Et puis, hop...on est pris dans le tourbillon des multiples tâches et on se retrouve le 1er septembre sans même qu'on s'en aperçoive.

Ceci étant dit, je le prends aujourd'hui, ce temps qui m'a fait défaut. Une petite pause dans la vie de maraichère si intense et riche, physiquement et aussi, quoi qu'on dise, intellectuellement. Comment ça? On peut cultiver des tomates, désherber pendant des heures, récolter des kilos et des kilos de pommes de terre et réfléchir en même temps. Je suis même convaincue que le "travail" de la terre, le contact avec la nature stimulent l'intellect et libèrent l'esprit, lequel esprit se trouve dégagé de toute pensée toxique. 

J'ai quitté ce que d'aucuns considèrent comme une activité intellectuelle - un travail de bureau s'entend - pour mettre les mains dans la terre et les pieds dans la boue. Bref, une activité manuelle qui vous noircit les ongles, tanne la peau et développe les muscles.

Vaine opposition et dichotomie aussi limitative que réductrice. Je n'ai jamais autant travaillé physiquement et en même temps, eu l'occasion de réfléchir à un tas de choses parce que justement, cultiver son jardin et en faire son activité principale vous interpellent sur le modèle de notre société qui ne tient plus debout, le système agricole dominant qui crée la faim plutôt que de la combattre, le gaspillage alimentaire, véritable scandale à tous les étages, la malbouffe ou comme je l'ai lu récemment, la camelote alimentaire qu'on nous sert chaque jour, le pillage et le vol de terres par des investisseurs financiers avides de rentabilité, le futur et très proche Traîté Transatlantique US-UE qui changera le contenu de nos assiettes, qu'on le veuille ou non, le bio industriel italien ou espagnol qui n'a de bio que le nom et qui envahit les grandes surfaces, les dites grandes surfaces le préférant aux produits bios locaux, la doxa dominante croissance-emploi-consommation-bonheur qui n'est qu'un gros mensonge auquel même les politiques ne croient plus. 

Pas un jour où, en tant que productrice alimentaire, je ne songe à tout cela et en même temps, même si la colère est là, je me dis à quel point j'ai la chance et la liberté de pouvoir exercer ce métier (presque) comme je l'entends. Je dis 'presque' parce que oui, il y a les exigences de la certification bio, la SAFER et la PAC qui protègent les "gros" agriculteurs, le débat autour de l'utilisation de ses propres semences. Malgré tout, il y a, et c'est encourageant, de plus en plus de "petits" qui y croient, qui luttent, qui veulent à tout prix garder leur indépendance...la forêt qui pousse.

Et le maraichage proprement dit me direz-vous? Les récoltes, le climat, les ravageurs, les maladies, les méthodes de culture, les associations de légumes?

Je pourrais vous parler par exemple des bienfaits de la grelinette ou du paillage, des attaques de mildiou, des purins d'ortie, prêle et autre consoude, des variétés de tomates, des altises ou de la mineuse du poireau, etc... Tout cela fait partie de mon quotidien de maraichère, bien sûr, et je remercie tous ceux et celles - Ferme Ste Marthe, Jean-Martin Fortier, Robert Morez, la Ferme du Bec Hellouin - qui partagent leur savoir, leur expérience avec beaucoup de générosité. Ils me sont indispensables dans la conduite du projet et dans les progrès à réaliser.

Au-delà de ces aspects techniques, il y a aussi toutes les joies, la liberté et l'énergie que procure la pratique du maraichage.

Joie de récolter après les semis, humilité devant les éléments et la puissance de la nature, énergie procurée par le contact avec la terre. Beaucoup d'agriculteurs, de paysans, de viticulteurs vous le diront: nous nous penchons sur la terre par soumission et aussi surtout par respect de tout ce qu'elle apporte.

Et puis, le maraichage crée des liens, avec les clients qui découvrent de nouveaux légumes près de chez eux - le fameux kale ! -, avec de futurs maraichers qui souhaitent se lancer et qui sont prêts à nous aider, avec des professionnels de la cuisine qui complimentent vos produits. 

J'oubliais: le chemin vers l'autonomie alimentaire. Du champ à l'assiette. Littéralement. Un vrai bonheur !

Voilà. Bonne rentrée à tout le monde puisque c'est dans l'air du temps et à bientôt.

Pour le plaisir, quelques photos de la saison:

Plants de tomate

Tomates fraîchement plantées avec leur tuteur en corde

Deux mois plus tard

Jeunes poireaux avant le repiquage

Les Jardins du Maine

Betteraves Chioggia

Capucines et salade du jardin...on mange aussi avec les yeux

Les légumes ont du nez...tomate Cyrano?

 

Note: par rapport à tous ces sujets de notre société qui bouge, je vous recommande vivement le site de documentaires Preuves Par Images http://preuves-par-images.fr/#. Décapant.

 

 

 

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Commentaires
R
Salut Bénédicte! <br /> <br /> <br /> <br /> je viens de faire un tour sur ton blog, sur lequel je n'étais pas allée depuis un moment! Que d'évolution sur tes parcelles! bravo pour tout ce travail et tout cet investissement! (et tes légumes sont beaux et généreux!)<br /> <br /> <br /> <br /> comment ça va depuis tout ce temps? le dernier article de ton blog m'a bien plu, les réflexions sur "les métiers intellectuels ou physiques"... aussi je dirais que le plus important à mes yeux dans ta démarche est que tu réussis à trouver ton épanouissement dans ton activité, et si chaque citoyen peut trouver le sentiment d'être heureux dans son activité, le monde serait certainement plus lumineux...<br /> <br /> ...<br /> <br /> voilà voilà, j'espère avoir quelqu'unes de tes nouvelles, entre deux désherbages ou une pause à bruxelles bientôt? passes-tu l'hiver à la campagne ou à la ville?<br /> <br /> <br /> <br /> A bientôt,<br /> <br /> bises maritimes!<br /> <br /> <br /> <br /> Rachel
J
Coucou Bénédicte, je suis toujours contente de lire de tes nouvelles. Cet été en vacances nous avons croisé un "paysan boulanger". Il cultive lui même ses variétés anciennes de blé, fabrique sa farine puis ses pains, pâtisseries... Il est sur tous les fronts. On a trouvé ça magnifique et pourtant il fournit un travail phénoménal, très physique, fatiguant. Heureusement qu'il y a des gens comme lui sur terre. Dommage qu'ils ne soient pas plus reconnus, soutenus. Par ton travail tu me fais penser à ce paysan boulanger. J'espère que jamais tu ne te lassera des rudes travaux de la terre. Le monde a besoin de toi!!
P
...et dernier petit commentaire à propos du titre de ton post "Je cultive, donc je pense" : il m'évoque le petit opuscule de Dominique Loreau que je finis de lire "L'infiniment Peu" et dans lequel elle prône, entre autres, une frugalité intellectuelle où les pensées (souvent polluantes) devraient laisser la place à la conscience, celle cultivée par les maîtres bouddhistes. Peut-être est-ce cela cette libération de l'esprit que tu décris? Je t'en recommande la lecture :-)
P
Quel plaisir de te relire Béné, toujours ce style fluide hyper agréable à lire, toujours ce partage de pensées et d'observations sur lesquelles tu fais bien de nous (ré)interpeller et sur lesquelles on ne peut que te rejoindre. <br /> <br /> Pura vida!<br /> <br /> Bisous
Bénédicte à la campagne...
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  • Le parcours d'une citoyenne de la ville en route vers la campagne... Maraîchage bio, retour à la terre, autonomie, partage et respect de soi, de la Terre et des autres. Parce que "cultiver son jardin est un acte politique" (Pierre Rabhi).
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